« Ils restent ici tous les jours jusqu’à la fermeture, de 07 heures à 22 heures. Certains ne sortent pas pour aller manger ou boire, de peur de perdre leur place. Des filles leur apportent des collations et des boissons gazeuses», explique Luc K qui gère un Cybercafé -une pièce étouffante- dans un quartier populaire principalement fréquenté par des jeunes, connus familièrement en Côte-d’Ivoire sous la dénomination de «brouteurs» (mangeurs d’herbe).
« Je ne sais vraiment pas comment ils procèdent, mais je vois qu’ils récoltent des milliers d’adresses e-mail par jour à l’aide de diverses applications et envoient d’innombrables courriels d’offres de services à ces adresses. Une fois qu’ils obtiennent une réponse, ils harcellent leur correspondant, jusqu’à leur extorquer de l’argent, qu’ils dilapident aussitôt en achetant de la bonne compagnie, les téléphones portables, les montres de luxe, les parfums, les boissons alcoolisées et parfois des voitures».
Une histoire commune
Cette histoire est celle de presque tous les cafés Internet qui prospèrent dans la capitale économique ivoirienne qui compte, au 31 décembre 2014, six millions d’habitants. Armand Z, co-fondateur d’une ONG qui milite contre l’utilisation abusive d’internet au sein de l’Afrique de l’Ouest, confirme cette constance. « Vous ne pouvez pas trouver un cybercafé à Abidjan sans ces coquins», dit-il, avant de préciser : « Ils ont abandonné l’école et croient qu’ils peuvent réussir dans la vie grâce à l’escroquerie sur Internet. Ils ont vu d’autres jeunes hommes de la ville qui ont acquis de l’argent de cette façon avant de le « blanchir », en investissant dans des entreprises ou dans l’immobilier. Notre crainte est que ces individus dangereux deviennent des modèles pour les autres jeunes ».