Qu’est-ce que le prix ? Comment est-il constitué ? Vos prix sont-ils basés d’après un système invariable ? Ou les évaluez-vous au hasard, d’une façon approximative ? Pour les fixer, agissez-vous comme le Kaiser, en despote, ou rationnellement, comme un homme d’affaires ? Cet important problème des prix, le résolvez-vous en comptant le plus cher possible, compensant telle perte sur un article par un gain sur un autre ? Ou suivez-vous un système immuable qui répartisse sur toutes les ventes une invariable proportion de bénéfices ? Votre évaluation se fait-elle d’après une cote préétablie ou selon le client ? Ou selon votre besoin d’argent ? Possédez-vous une vision claire de vos intentions, de votre conduite, ou les modifiez-vous au jour le jour selon que les circonstances vous y contraignent ?
Il faut bien étudier le prix de vente
Il est vrai que les prix sont toujours déterminés par des considérations innombrables. Le prix brut de la marchandise, l’état du marché, la compétition des acheteurs, le montant du loyer, celui des impôts, l’importance du personnel, la situation générale, voilà autant de conditions dont il faut tenir compte en même temps que de votre bénéfice.
Il ne faut pas croire que ce soit une chose simple que d’établir un prix de vente, c’est une opération éminemment complexe. Et bien des gens perdent de vue l’existence d’un « prix normal », d’un cours, aussi bien que d’une loi des prix, invariable et permanente, qui demande à être suivie. Tant qu’un commerçant ne recherchera pas activement tout ce qui constitue son prix coûtant, pour y ajouter un bénéfice raisonnable, son affaire ne sera pas prospère. Le seul, le véritable objet du commerce, c’est le bénéfice qu’on y trouve, ce n’est pas le passage des marchandises d’une main à une autre.
Toute opération qui ne rapporte pas sort du domaine des affaires
Vendre la marchandise au-dessous de son prix réel de revient n’est plus faire du commerce, c’est faire faillite : cela n’a pas plus de rapports avec les affaires qu’une puce n’en a avec un chien. À partir du moment où on fait banqueroute, on devient étranger au commerce. Combien de fois faut-il souligner ce fait pourtant fondamental. Si la maladie est le contraire de la santé, la faillite est le contraire de la réussite. Et en matière commerciale, toute opération qui ne rapporte pas sort du domaine des affaires.
Certains fonctionnaires s’imaginent sincèrement être « dans les affaires ». C’est là une grave erreur : ils ne sont que des fonctionnaires du Gouvernement… et pas autre chose. L’Administration des Postes et Télégraphes, qui, au cours de son existence, a perdu des millions, n’est pas « une affaire ». Elle est, si vous voulez, un des services du Gouvernement ou une des formes de la banqueroute, mais ce qu’elle fait n’a rien de commercial.
Il existe ainsi de braves gens qui, dans nos villes de province, détiennent un emploi officiel et sont persuadés que les affaires municipales sont des « affaires », alors que chaque exercice s’y traduit par un déficit et que, pour le combler, il est nécessaire de lever de nouvelles taxes. Ils ne se rendent pas compte que, lorsqu’une entreprise est soutenue par des taxes et non par des bénéfices, elle n’a pas la moindre parenté avec une entreprise commerciale.
Ainsi, pas davantage, le socialisme n’a de rapports avec les affaires. D’ailleurs, les socialistes ne se font pas faute de nous le dire. Mais, par essence, le socialisme entraîne la suppression de toutes les affaires : c’est la négation du système des bénéfices, l’institution du fonctionnariat universel et obligatoire. Souvent, dans les administrations de l’État, le « prix » est une illusion, un trompe-l’œil. Il n’existe guère aujourd’hui de plus vaste fumisterie que celle des prix comme on les pratique dans ces entreprises de banqueroute que sont les municipalités et les gouvernements. Le client est autorisé à payer une certaine partie du prix de revient ; au contribuable de payer le reste.
Comment calculer le prix de vente ?
LE PRIX DE VENTE = LE PRIX DE REVIENT TOTAL + LE BÉNÉFICE.
Cet axiome ne peut être ni contesté, ni déplacé. Ce qu’il exprime n’est pas une affirmation, c’est une vérité aussi indiscutable que cette vérité mathématique : « Le tout est plus grand que la partie. »
Le commerçant qui a pour habitude de gâcher les prix, et qui inconsciemment joue en quelque sorte dans le monde des affaires un rôle néfaste, ne fait pas exception. Parfois il lui arrive de réussir, c’est qu’il a eu l’adresse de majorer les prix de certains articles (ceux auxquels on ne fait pas attention) pour pouvoir abaisser d’autant ceux des objets que le client remarque.
Lorsqu’un commerçant va jusqu’à vendre au prix coûtant ou même à moins, c’est qu’il est en mauvaise posture, et on peut prédire qu’il quittera bientôt la lutte commerciale pour aller grossir la foule des faillis. En pareil cas, il est parfaitement possible que les acheteurs réalisent quelque gain en profitant de ses malheurs, mais, à la longue, rien n’est plus préjudiciable et plus onéreux pour une nation que l’accumulation des faillites.
Il faut veiller à nos propres intérêts
Aucun article ne devrait être mis en vente avant que son prix de revient net n’ait été soigneusement et profondément étudié. Une fois additionnés tous les chiffres qui constituent ce prix de revient, il est prudent de compter un certain pourcentage pour les frais imprévus, puis on ajoute ensuite un bénéfice équitable. Faire autrement, faire moins, c’est non seulement se causer à soi même un regrettable préjudice, mais c’est en causer un aux clients, à la branche à laquelle on appartient, et au monde des affaires dont on fait partie.
Les prix sont rarement trop élevés. Le désir de vendre est si invétéré que notre instinct naturel nous pousse à fixer les prix trop bas. Mais nous ne devons, en aucun cas, perdre de vue que notre devoir essentiel est de veiller à nos propres intérêts ; que nous avons à nous protéger contre le public, qui jamais ne nous paiera un prix supérieur à celui que nous lui demandons. Le public n’a aucune conscience des prix ; la dame qui court les magasins adore se dire qu’elle fait perdre de l’argent au marchand sur chaque achat qu’elle effectue.
Satisfaire les besoins du public
L’extravagante publicité faite autour des ventes réclames est la cause du chaos et de l’incohérence où sont actuellement les prix de vente. Le public s’est délibérément habitué à considérer le bon marché comme l’argument suprême. On lui a enseigné que le prix des choses est un facteur décisif, et c’est une grande erreur. En ce qui concerne la valeur des choses, le public n’a pas la moindre compétence. Il paiera volontiers très cher un objet à bas prix de revient et réciproquement. Ce qui importe, ce sont les besoins du public et le cas qu’il fait de la marchandise. Il est même des exemples où un prix élevé contribue à la vente. Un confiseur américain annonce, par exemple, que ses chocolats sont « les plus chers du monde », et il fait fortune.
« PRIX DE REVIENT TOTAL + BÉNÉFICE ». Voilà la seule définition légitime, la seule base du prix de vente. Si vous ajoutez votre bénéfice à un prix de revient qui n’est que partiel, vous commettez une grosse erreur. Et si vous rendez votre marchandise au prix coûtant, sans bénéfice, soyez bien sur que vous ne tarderez pas à devenir la proie des huissiers.
Notis©2013
Sources : Herbert N. Casson « la réussite en affaire »