La réussite dans la politique — comme dans la vie — est plus une question de chance que de compétence. Et peut-être les deux à la fois. Dans tous les cas, cette semaine, dernière ligne droite avant les élections présidentielles américaines du 06 novembre 2012, le Président Obama nous a (encore) donné une image fidèle à la baraka, l’art du rebondissement. En effet, au cours de cette semaine qui s’achève, Barack Obama a sans doute réussi à optimiser ses acquis politiques, en tirant vers lui la couverture d’événements qu’on était loin d’imaginer, il y a un mois.
Une économie prometteuse
Selon le rapport officiel sur l’emploi publié vendredi 2 novembre 2012, le taux de chômage officiel est remonté de 0,1 point pour s’établir à 7,9 %, après une chute totalement inattendue en septembre, qui l’avait fait tomber à son niveau le plus faible depuis l’arrivée du président Barack Obama à la Maison Blanche en janvier 2009. Cette remontée du chômage est conforme à la prévision médiane des analystes.
Les chiffres, publiés par le département du travail, sont meilleurs en ce qui concerne les embauches. Selon le ministère, l’économie américaine a créé en effet 171 000 emplois de plus qu’elle n’en détruisait en octobre.
Le solde net des embauches apparaît ainsi en hausse de 16 % par rapport à septembre, et très supérieur à la prévision médiane des analystes, qui donnait 125 000 créations de postes nets. D’autre part, le ministère a revu en hausse de 33 % son estimation des embauches pour août et septembre, ce qui tend à expliquer a posteriori la forte baisse du taux de chômage relevée en septembre (- 0,3 point).
Le solde des créations d’emplois net du secteur privé en octobre (184 000), en hausse de 44 % sur un mois, est à son plus haut niveau depuis février et nettement supérieur à ce sur quoi tablaient les analystes (130 000). Le gouvernement précise par ailleurs que l’ouragan Sandy n’a eu aucun effet sur ses chiffres.
Le Commandant-en-Chef
En début de semaine, la désolation causée par l’ouragan Sandy sur la côte est a permis à Barack Obama de ranger son manteau de candidat pour revêtit le costume de commandant en chef. Il ressort d’un sondage diligenté par le Washington Post et ABC News, que huit personnes sur dix interrogées estiment que le Président Obama gère cet évènement de façon « excellente » ou « bonne ». Pour les électeurs indépendants qui départageront les deux candidats le 06 novembre, la cohésion nationale doit prendre le pas sur les querelles politiciennes lorsqu’il s’agit d’une catastrophe d’une telle ampleur. L’image du Président Obama marchant main dans la main avec le Gouverneur du New Jersey, le républicain Chris Christie, l’un de ses plus farouches pourfendeurs, est une chose que ces électeurs décisifs apprécient. L’annonce, jeudi 1er novembre, du soutien du maire de New York, l’indépendant Michael Bloomberg, est révélateur à cet égard.
En claire, Sandy est certes un désastre et une tragédie pour des millions de personnes. Mais cet ouragan survient à une semaine exactement du scrutin final. Il serait donc naïf de croire qu’il n’aura pas d’incidence sur la politique américaine.
Du reste, ce n’est pas la première fois que Barack Obama fait preuve de cette faculté à tirer profit de l’inattendu pour consolider ses acquis, in extremis. Comme l’a écrit David Maraniss, auteur d’un excellent texte intitulé « Barack Obama : une vie » paru dans la presse en début d’année : «Tout est parti d’une chance qu’il a su saisir pour sortir de l’obscurité et être propulsé au premier plan de la scène politique nationale, il y a à peine huit ans. John Kerry, alors porte flambeau du parti démocrate, lui demanda de faire le discours principal de la convention nationale de 2004. Ses adversaires les plus farouches au Sénat Américain furent démontés les uns après les autres par un rapport mettant en lumière leur mode de vie inapproprié. Comme l’a si bien dit Wesley Branch Rickey, joueur devenu entraineur en Ligue majeure de baseball, «la chance est à la base de tout». Il n’y a aucun doute qu’Obama possède la baraka politique qui lui permet de tirer profit des crises inattendues. Il l’a démontré, il y a quatre ans quand il eut à manœuvrer contre Hillary Rodham Clinton et John McCain sur le chemin menant à la Maison Blanche. »